EXPOSITION
PHOTOGRAPHIQUE
ERNEST PIGNON-ERNEST
PARCOURS MAHMOUD DARWICH, RAMALLAH, 2009
Il est des moments de l’Histoire, moments le plus souvent cruels, troublés, qui
semblent sans issue, où un artiste rencontre et traduit tout un peuple, où sa parole invente les mots-tocsins qui ne cesseront de résonner, d’inspirer, de mobiliser, de tenir en alerte. Pour la Palestine,
Mahmoud Darwich fut et demeure celui-là. Dès ses premiers écrits,
l’auteur de La terre nous est étroite se trouva en quelque sorte marqué par le destin, avec ce que cela comporte d’élans,
de ferveurs, de contraintes, et d’entraves aussi. Son défi fut de
répondre en homme et en poète à cette malédiction des temps, sans
y perdre sa voix. En cela, il fut unique, irremplaçable. À la fois héros populaire et amant solitaire : comme né d’une même blessure dans deux registres du chant.
Ernest Pignon-Ernest connaissait Mahmoud Darwich et entretenait avec lui des
liens d’amitié. Il l’avait déjà portraituré avant de le recevoir dans
son atelier d’Ivry en octobre 2007. Rendez-vous avait été pris pour
des retrouvailles à Ramallah quelques mois plus tard. La mort du poète
en août 2008 changea brutalement le sens de la visite, mais Ernest
Pignon-Ernest n’ajourna pas son voyage en Palestine. Très vite, il
prit la décision de défier l’absence en usant comme toujours de la
seule arme en son pouvoir : le dessin.
Imposer la présence de Darwich en des lieux symboliques, c’était non seulement
relayer ses combats et son message, c’était également exorciser l’exil
qui avait si longtemps envahi sa vie. Cet homme debout, calme, déterminé,
surgissant de l’autre côté du destin, affirmait simplement son droit
à être là. Dans le jardin de Sakakini, près de son bureau ; au check point de Qalandia ; au coin d’une rue de Bethléem ; au cœur d’une maison détruite à Jérusalem ; contre le mur de béton qui isole la Cisjordanie ; ou encore sur une pierre de son village natal, en Galilée.
« Comme si j’étais joyeux, je suis revenu », dit un poème de Mahmoud Darwich. Sans préjuger de la joie, car elle se fait là-bas infiniment
attendre, Ernest Pignon-Ernest a donné corps et figure à ce retour.
André Velter
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Du 19 octobre au 2 novembre 2013
Salle Adultes Bibliothèque Méjanes
Vernissage le samedi 19 octobre à 11 h 30
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EXPOSITION PHOTOGRAPHIQUE
JACQUES LACARRIÈRE
CHEMIN DE L’ÉTÉ GREC...
Ces photos datent du temps de mes premiers éblouissements avec le soleil grec.
Je découvrais alors en Grèce les îles livrées à la lumière et à son
double inéluctable : l’ombre. Et, sur « ces escaliers de pierres du
mois d’Août » dont parle le poète Elytis, les surfaces où reliefs
et volumes s’abolissaient pour devenir le damier noir et blanc du
soleil. Un pays, en somme, où la rigueur janséniste de la chaux, s’opposait
aux vertiges de l’ombre. Pays presque inhumain tant il devient austère.
Ces lieux nus et brûlants, avec leurs arêtes vives et leurs surfaces
arasées, évoquent pour moi les vieilles géométries d’Euclide et de
Thalès. C’est d’ailleurs ici qu’elles sont nées, dans ce pays géométrique
où le soleil joue aux mathématiques avec l’ombre. Au fond, je m’en
aperçois aujourd’hui, ce que je voulais faire, ingénument alors, c’était
tout simplement rendre soudain visibles, sur les murs ou le sol de
Grèce, les théorèmes de la lumière.
MOINES ET ERMITES DU MONT ATHOS...
Le mont Athos - souvent surnommé le Tibet du monde chrétien - est une grande
presqu’île située dans le nord de la Grèce et qui, depuis le Xlème
siècle, abrite une communauté d’une quarantaine de skites (lieux d’ascèse)
et de monastères orthodoxes. C’est une république théocratique indépendante
gouvernée par les représentants élus des différents monastères. Dans
le sud de la Sainte Montagne - comme on nomme aussi le mont Athos
- vivaient jusqu’à ces dernières années quelques dizaines d’ermites,
réfugiés dans des grottes quasi inaccessibles et qui avaient fait
voeu de rompre tout contact avec le monde profane. Ils étaient les
ultimes descendants des grands anachorètes des déserts d’Éygpte et
de Syrie. Les photos exposées ici ont toutes été prises au cours des
trois années - 1950, 1952, et 1953 - où je leur ai rendu visite dans
leurs repaires et dans leurs grottes. Je craignais alors d’être accueilli
comme un intrus mais chacun d’eux me reçut au contraire avec la plus
extrême bienveillance. Je pus passer ainsi dans ces grottes et sur
ces falaises quelques jours inoubliables, dans la méditation et le
silence. Heures de grâces et de plénitude qui me donnèrent le sentiment
d’être transporté hors de tout temps réel. Je pu alors les photographier
sans réticence, avec leur consentement, pour garder mémoire de ces
hommes, veilleurs du bout du monde.
Jacques Lacarrière
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Du 19 octobre au 2 novembre 2013
Rue Jacques Lacarrière Bibliothèque Méjanes
Vernissage le samedi 19 octobre à 11 h 30