« Perpétueux voyages »
Germain Nouveau arpente les routes tout au long de sa vie, bien souvent à pied : il se rend à Bruxelles, à Londres, puis en Espagne, en Italie, en Algérie et au Proche-Orient (Liban, Jérusalem, Alexandrie).
En 1893, il est à Alger, à la recherche d’un climat pouvant soulager ses rhumatismes. C’est de là qu’il envoie la lettre dite « lettre fantôme » à Arthur Rimbaud qu’il croit toujours à Aden (actuel Yémen), alors que celui-ci est mort deux ans auparavant. Il lui fait part de son souhait d’ouvrir à Aden « une modeste boutique de peintre décorateur ».
En 1908, il parcourt l’Italie en faisant le portrait pour vivre. Ce voyage est entièrement consacré à la peinture. Il envisage même d’en faire son métier à son retour en Provence.
Sorti de Bicêtre et arrivé à Londres après un passage par Bruxelles, Nouveau fait part à sa sœur de plusieurs projets : faire publier son « manuscrit » (La Doctrine de l’amour) par Léon Vanier, écrire un ouvrage en prose intitulé Religious Life, ainsi qu’un « tout petit traité de dessin et de peinture pour [sa nièce] Marie-Louise ». Il incite sa sœur à mettre ses filles au piano, à la harpe et au violon : « Rien n’est aussi près de la religion que la musique ».
Laurence lui écrit à Milan et Bologne, ignorant qu’il marche vers Rome. « Je voudrais que tu trouves là ce que tu y es venu chercher : la réalisation de ton désir, la paix, le repos, la vérité, tout enfin ce que tu désires ».
Germain Nouveau se plaint auprès d’Ernest Delahaye de ses rhumatismes qui l’inquiètent : « Je crains d’y perdre ma situation de professeur de dessin ». La lettre est agrémentée de dessins humoristiques : « Livre de médecine page 59 – le rhumatisant doit éviter de boire, de manger, de fumer, etc. moyennant quoi il se portera bien ».
Germain Nouveau adresse cette lettre à Arthur Rimbaud, qu’il croit à Aden. Or Rimbaud est mort deux ans plus tôt, ce que Nouveau ignore (il est alors tout juste sorti de Bicêtre et se trouve à Bruxelles). « Je suis à Alger, en qualité de professeur de dessin en congé, avec un étique traitement, et en train de soigner (mal) mes rhumatismes ». Nouveau dit qu’il est sans nouvelle de Verlaine et Delahaye « depuis bientôt deux ans » et fait part à Rimbaud de son projet d’ouvrir à Aden « une modeste boutique de peintre décorateur ». Il conclut par « Ton vieux copain d’antan bien cordial », et ajoute en post-scriptum : « Je suis en train d’apprendre l’arabe, sais l’anglais, et l’italien ; ne peut qu’être utile à Aden ».
« […] vu la distance, mon habitude d’aller à pied, mon manque d’horloge, la variation des horloges, etc…. Prière de ne me point attendre dimanche pour vous mettre à table à votre heure ordinaire. »
« [...] Ce qui ne m’empêche pas de commencer la nature morte de l’ours, du flacon et du timbre. Si je la réussis, je vous rendrai ces trois objets en peinture ! Car autrement je ne m’en déferai point ; ce sont petits souvenirs qui nous rendent plus chères les heures passées. »
Germain Nouveau relate à son cousin son voyage en Italie. Il y « fait le portrait », se perd, « ayant oublié [sa] petite carte d’Italie » et découvre ainsi Orvieto, « un bijou artistique ».
Reliée dans Poésies d’Humilis, A.
Germain Nouveau expose à son cousin Silvy ses techniques de portraitiste par lesquelles il espère vivre : « Tu me dis d’augmenter mes prix, pour me mettre bientôt à même d’aller tenter plus près de notre cher ruisseau du Var la fortune du portrait. ». Il explique sa méthode, c’est-à-dire présenter des « spécimens au grand complet : 1. Portrait peint à l’huile (profil). 2. Portrait à l’estompe, genre photographie, de face ou de trois quarts. 3. De face et de profil (petit format). 4. De profil (plus petit format). 5. Caricatures. 6. Silhouettes. 7. À quoi j’ajoute (mais j’espère n’avoir jamais à en user) le portrait de mémoire, avec quête dans l’honorable société ! ».
Il s’agit peut-être du tableau évoqué plus haut dans la lettre à son cousin (20 juin 1908). Germain Nouveau l’a offert au fils de son cousin, René Silvy. Au dos du tableau figure le texte suivant :
Étrenne (épigramme dans le goût de Martial)Pour être de bois et pour être une ébauche(Dont je suis bien fâché)[L’]ours qu’on voit icy peint est deux fois mal léchéReçois le de ma main soit elle adroite ou gaucheà René Silvy 10 janvier 1909 son petit oncleBernard La G.
Germain Nouveau joint sa demande de secours financier au Ministère.
Le « Pacte social, pour parler le langage actuel, […] oh ! de combien de besoins ne nous a-t-il pas encombrés, comme celui de faire empeser un faux-col, acheter des souliers, des chaussettes, des caleçons, deux douzaines de chemises, deux pantalons de fantaisie, avec veston, et casquette ; et trois pantalons habillés avec jaquette et chapeaux ronds ; trois gilets de luxe, deux de soirée, redingote, chapeau de haute forme, costume de chasse, costumes de chauffeur, de cycliste, de touriste, etc ».